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Spleen d’un soir

mardi 3 juillet 2012, par Dominique Dupuy


Pour une putain qui cherche des bras,
Pour une saleté affamée qui tend la main et mendie un bout de pain dérisoire,
Pour un gosse au visage creux, morve au nez,
Pour le salaud qui se découvre une conscience au détour de ses méfaits.

Pour toutes ces années perdues,
Vraiment « avec le temps on n’aime plus ».

Pour ce port enfoui dans la brume, perdu au milieu des mers,
Pour ce fort autrefois invincible devenu aujourd’hui ruine lamentable,
Pour ce vaisseau autrefois guerrier, victorieux et maintenant galère misérable,
Pour cette île luxuriante mais rien d’autre qu’un enfer de marigots, palétuviers et serpents d’eau.

Pour toutes ces années perdues,
Vraiment « avec le temps on aime plus ».

Pour cette foi que l’on veut transcendante,
Déclassée au rang de circonstance atténuante, témoin de ce qui n’est plus,
Pour ces blasphèmes crachés, vitupérés par ce mal rampant,
Crapaud vicieux, trompeur, gluant de flatteries minables,

J’ai nommé le capitalisme, argent élevé au rang de roi,
Noblesse de pacotille, repaire de corsaires défigurés par l’envie du pouvoir et de richesses,
Flatteur minable des vanités à faire miroiter des lendemains chantants.
Serpent ne sifflant rien d’autre qu’un monde miroir aux alouettes.
Tu me dégoûtes à faire tomber les fragiles, les ignorants et les naïfs.

Orgueilleusement indétrônable,
Infiltré dans les moindres recoins des âmes même les plus aguerries à reconnaitre le Malin.
Tout se monnaye et s’engouffre dans une société de comptables implacables et falots.

Vaisseau fantôme qui salit les hommes à son passage,
Tu ne laisses dans ton sillage que temps corrompu.
Tout s’achète, tout se vend,
Le vice ? Quand la norme est aux plaisirs rapides et violents,
Le beau ? Quand la splendeur des femmes est à la blancheur squelettique.

Mais l’espoir, l’espoir …
Celui qui brille légèrement dans les yeux de la putain la plus aguerrie,
Celui qui détrône le tyran emporté par une foule juste et brave,
Quand il surgit du fond de l’âme du plus cynique, oui, celui qui ose penser que,
Peut-être, un geste de partage est encore possible quelque part.

Et le temps qui me fait signe, brise mes ardeurs, refroidit mes espérances,
Ne m’emporte plus que dans une foi de découragée,
Autrefois, portée haut tel un oriflamme d’amour et de courage,
C’est elle désormais qui me soutient,
Me reste à tout poser entre Tes mains …

Vraiment, avec le temps peut-on encore aimer ?

Avec quelque chose de Léo Ferré


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