dimanche 27 janvier 2008, par Laetitia Tendart
Clap
Scène 1... La cinquième roue du carrosse.
Tout avait bien commencé. Enfin dans la mesure où elle a pu se rendre disponible et s’épiler au dernier moment. Il l’a appelée, son amant. Enfin le terme est plutôt mal approprié. Ce serait son amant, si elle avait un mari. Ce n’est pas le cas. Par contre, lui, il a vraiment une femme, et elle est indiscutablement sa maîtresse. Celle qui doit donc s’épiler, celle qui doit être prête, clean quoi qu’il en soit. Elle est celle que l’on prend au dépourvu, celle qui doit réserver dans son programme quotidien une plage horaire pour lui. Celle qui n’a pas de vie privée. Celle qui n’a pas droit à l’erreur, celle qui ne doit pas avoir ses règles. Celle qu’il côtoie sans connaitre. Celle qui n’a pas de nom de famille. Celle avec qui, il ne partage rien même pas le plaisir, puisqu’il vient uniquement se vider. Celle qui vole à son secours quand il a un trop plein de sperme. Superwoman, celle qui n’a jamais mal.
Scène 2... L’empire des sens.
A chacun de ces gestes, elle frissonne. A chacun de ses souffles, elle tressaille. A chacune de ses paroles, elle s’impatiente. Face à lui, elle est docile, il est tout puissant. Quand il s’empare de ses lèvres, le sol se dérobe sous ses pieds. Elle enlève sa culotte en tortillant des hanches, puis dégrafe son soutien à la manière d‘une strip-teaseuse. A ce moment ses désirs sont désordre... Lui seul détient la clef de son bien être.
Scène 3 ... Le Nirvana.
Son corps épouse le sien à merveille, il est la pièce manquante à son puzzle. Elle flotte, il plane. Sa respiration devient rapide, la sienne s’entrecoupe. Ses gémissements se mêlent à ses spasmes. Elle le chevauche et soudain, une sensation d’extrême légèreté, le grand huit, le plaisir à l’état brut. Le grand tourbillon. Elle déguste et rejette délicatement son corps en arrière pour se soustraire à l’envoûtement. Haletante, souriante, en sueur, elle cherche dans son regard un sentiment, mais ses yeux ne disent rien, son expression ne varie jamais.
Scène 4... Le coup de caleçon !
Ses jambes tremblent de plaisir, mais les siennes sont raides, comme celles d’un cadavre tandis que ses mains sont occupées à tâter, à chercher ... Son caleçon. Il a d’ailleurs réussi à le retrouver dans le noir, sans se tromper, au milieu des chaussettes (époustouflant). Il a une technique bien à lui pour mettre les deux jambes dans son caleçon sans même avoir à lever les fesses (épatant). Elle hallucine. Il remet rapidement son caleçon. A-t-il un problème avec son corps ? Ou est ce, un reste de timidité, reliquat de sa petite enfance ? Parce que évidemment, elle n’imagine pas une seconde qu’il ait un problème avec le sien. A moins qu’il ne vienne que tirer son coup ?
Elle reste sans voix, seule, face à son plaisir. A moins de cinq minutes du grand huit, il se lève et disparaît.
Scène 5... Chiottes !
Immense moment de solitude pour elle, allongée sur son lit. Elle entend les bruits et devine ses faits et gestes. Un, deux, trois, il se nettoie. Elle l’imagine debout sur la pointe des pieds face au lavabo. Il efface au savon toutes traces d’elle. Quatre, cinq, six, Il jette le préservatif et pisse. Sept, huit, neuf, il refait peau neuve. Dix, onze, douze, il fume son buzz. Le voilà, vêtu de son scaphandre. Il s’allonge près d’elle, ne dit mot et contemple le plafond blanc. Elle l’observe en silence, assaillie, comme cela lui arrive si souvent quand elle est avec lui, par l’impression de s’être trompée d’histoire. Non, elle est plus lucide qu’elle ne veut le croire. Elle n’attend plus grand-chose, si ce n’est qu’il l’entoure de ses bras puissants. Merde, un geste Humain, dans cette relation creuse.
Scène 6... Paris ouverts
Dix minutes de silence. Elle compte et parie sa tête qu’à cinquante, il allumera son téléphone. A cent, il regardera sa montre. A cent-vingt, il prendra un air désolé, à cent-trente, il enfilera ses chaussettes, son pantalon, sa chemise, ses godasses et à deux-cent, il lancera un "à +". Elle connait les feintes. Un, deux, trois... douze... cinquante cinq ... soixante seize. Il l’allume enfin ! Elle a eu peur pour sa tête. Cent...cent-dix...Il interroge sa messagerie, cent quinze, se redresse et se rhabille. Cent quarante sept...Cent cinquante neuf... cent -quatre -vingt- dix, il est là debout sur le seuil de la porte, l’air faussement désolé et change de formule. Cette fois-ci, elle a droit à « on se rappelle » et il termine sa phrase d’une voix sonore, comme au théâtre.
Scène 7... Le baissé du rideau
Il claque la porte. Elle reste sur le cul.