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Anabase

mercredi 21 février 2007, par Séverine Capeille


- Bonjour Pierre Emmanuel Scherrer, tu représentes le groupe Anabase*. Parle nous d’abord de toi et de cette dichotomie entre ton métier d’avocat et tes activités artistiques.

En gros c’est droit le jour, musique la nuit. Parfois l’inverse. Ca n’est pas très éloigné, contrairement à ce qu’on pense ; il y a des maîtres-chanteurs fabuleux chez les avocats et des juristes qui s’ignorent chez les musiciens. Jusqu’à aujourd’hui, c’était plutôt amusant cette dichotomie. Parfois, ça donne lieu à des situations cocasses. C’est une sorte de grand écart où à chaque instant tu peux te ramasser. Demain, si j’ai trop mal aux articulations, je réduirai l’écart.

- Et que font les autres membres du groupe ? Ils ont des activités aussi sérieuses que toi la journée ?

Ceux qui bossent en dehors de la musique ont un job moins prise de tête je pense. D’ailleurs j’ai remarqué qu’ils font des blagues beaucoup plus drôles que moi. C’est peut-être lié. Je vais me repositionner sur le marché du travail. Plus de la moitié des membres du groupe sont des musiciens à plein temps. D’ailleurs je vais vous les présenter. Par ordre d’apparition, il y a Clara. Clara est brune, elle a des yeux qui pétillent et elle chante comme une sirène, d’après Frédéric Vignale. Ensuite, il y a Jean-François, guitariste cajoleur qui raconte des blagues avec des gestes faramineux. Après, il y a Laurent, un batteur qui décoiffe, aux gestes d’une rare élégance. Puis vient Romuald, guitariste acoustique à la précision chirurgicale. Enfin, Jean, ou John, ou John-John, ou Johnny Cash, c’est selon, tout nouveau bassiste du groupe.

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credit Clara Scherrer

- Comment vous êtes vous rencontrés ?

Internet. On redira jamais assez les mérites d’internet.

- Clara est la seule femme du groupe. Hormis sa voix, particulièrement envoûtante, quelle est sa principale qualité à tes yeux ?

Ah ah. Clara est un mystère. Peut-être un extra-terrestre. On entretien le doute.

- Et son pire défaut ?

Ah ah, chère Séverine, tu es bien curieuse. Clara est peut-être la fille de Jacques Beauregard, le fameux cowboy inventé par Sergio Leone. Mais je n’en dis pas plus.

- Si je lui posais les mêmes questions à propos des quatre garçons qui l’accompagnent dans le groupe, tu penses qu’elle répondrait quoi ?

Je préfère pas répondre à cette question. D’ailleurs Clara est un mystère que nous autres, membres du groupe, n’avons pas éclairci. Alors quant à savoir ce qu’elle pense, ça relèverait de l’affabulation que la rigueur journalistique ne peut pas admettre. Certains pensent qu’il s’agit de la petite sœur de Beth Gibbons, d’autres la petite fille cachée de Frida Khalo. Un jour, l’un des membres m’a avoué que la vraie Clara n’était peut-être pas celle qu’on côtoyait, qu’il y aurait en fait deux Clara. Quant à moi, je pense que la thèse de l’extra-terrestralité de Clara a des fondements solides.

- Raffinée, sensuelle, cristalline, mystique, évanescente… Les adjectifs ne manquent pas pour qualifier la voix de Clara Scherrer. Et pourtant, elle s’est autoproclamée « Mussolinette ». Elle serait « une main de fer dans un gant de velours » ?

Tiens, je me dis que ça vaudrait le coup de faire chanter Margaret Thatcher, juste pour voir si sa voix trahit sa vraie nature. Quant à Clara, elle s’est auto-proclamée Mussolinette le jour où elle s’est rendue compte que pour aller d’un point A à un point B, nous, les garçons, on a tendance à aller voir du côté de chez Z en repassant par Q (au hasard). Et puis, nous, les hommes (il y en a qui me contrediront), n’avons-nous pas tous secrètement rêvé un jour où l’autre d’être gouvernés par une Mussolinette raffinée, sensuelle, cristalline, mystique et évanescente.

- Vous sortez un album le 26 avril prochain : Le Bonheur Flou (distribution Anticraft). Le titre m’interpelle. Vous faites de la « pop mélancolique », ce qui signifie une musique qui inspire ou qui est empreinte de tristesse, de pessimisme… Plutôt que le bonheur, ce ne serait pas plutôt le regret du bonheur flou ?

La mélancolie, d’abord, c’est un mot qui sonne tellement bien que même si tu sais pas ce que ça veut dire, ça te plonge dans un état second rien qu’à le prononcer. Après, c’est vrai que ça évoque la tristesse, le pessimisme. En même temps, il s’agit plus pour nous d’un état, d’un climat entre deux eaux, un espace un peu obscur d’intimité avec soi-même, de plongée à l’intérieur de soi, un espace où la beauté se confond avec l’obscurité, peut-être parce que derrière, précisément, il y a le bonheur qui apparaît par les interstices, les failles de la "tristesse". Disons que l’on peut aborder le bonheur de deux façons : soit par le côté obscur, avec l’idée que le bonheur c’est ce qu’il y a après la mélancolie, derrière la tristesse, et là, d’un point de vue musical, ce qu’on fait est plutôt sur un mode mineur avec des éclats de sonorités majeures ; autre possibilité pour aborder le bonheur : par le côté plein-jour, en disant ouah c’est extra c’est super cool, t’as vu comme on est tous heureux, un truc des malade le bonheur, tiens on va faire un morceau en la majeur qui s’appellera "que du bonheur" tellement c’est l’éclate. On a plutôt tendance à être dans le premier mood.

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credit Raphaele Kriegel

- Le « Bonheur Flou » c’est « le silence avant la neige, la piscine, les songes déclenchés par le passage des trains, le brouillard cérébral, la fuite sur les autoroutes, la métamorphose » évoqués dans les textes de Clara. Et ce serait quoi alors, le Bonheur FOU ?

Un bonheur flou sans aile. Non, c’est pas drôle. Le bonheur fou, on a eu tellement mal à le définir qu’à la fin on a constaté qu’il était flou.

- Vous avez commencé en 2003. Sistoeurs aussi. Voilà. C’est important de rappeler les dates. Ce n’est pas une question. C’est un constat. Si tu veux parler d’un moment important, d’une seconde inoubliable, d’un jour légendaire de votre carrière… c’est là !

Le 21 juin dernier, pour la fête de la musique, on était invités à jouer dans une salle de concerts pas très loin de Paris. Quand on est arrivés, il y avait plein de types qui hurlaient dans leur micro en cisaillant leur guitare électrique à grands gestes ravageurs. C’était bien destroy. On est passé entre deux groupes de métal un peu dur. On a eu un peu de mal à capter l’attention du public avec notre pop mélancolique. Voire beaucoup de mal. On peut même dire que ce fut un désastre. Néanmoins, je pense que c’était une sorte de jour légendaire.

- Clara et toi avez traversé les USA en mobile home à la rencontre de Clint Eastwood. On peut lire vos aventures sur http://www.anabase-usa.com. La première chanson de l’album s’appelle d’ailleurs « Les Grands axes américains ». Vous pensez repartir bientôt ? Aller ailleurs ?

On aimerait bien retourner aux USA, faire tout ce que l’on a pas pu faire, se poser dans un endroit désert pendant plusieurs jours, chose que l’on a pas pu faire lors de notre périple, car on bougeait pratiquement sans arrêt. Et puis on irait bien jusqu’au Mexique.

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credit Raphaele Kriegel

- Onze titres sur votre album. Comment avez-vous choisi leur enchaînement ? Il s’est imposé simplement où il vous a fallu tâtonner pour trouver ce qui permettrait de plonger le public dans votre univers ?

L’ordre des chansons c’est toujours le fruit de longues discussions qui virent parfois au débat métaphysique. C’est pareil pour l’ordre des concerts.

- Et puisque je parle de « plonger », ça me fait un enchaînement tout trouvé pour évoquer votre titre « La piscine ». La vidéo est disponible sur le web, ainsi que celle concernant « Les Grands axes américains ». Quelle sera la prochaine ?

Il y a aussi le clip du "Cyclone imaginaire" réalisé par Frédéric Vignale. Tu ne l’as pas mentionné celui-là. Pour l’instant, rien de prévu pour la suite. Avis aux amateurs. C’est vrai qu’on aimerait aussi réaliser un clip nous-mêmes, avec notre visuel, histoire de pousser le concept graphique de cet album le plus loin possible.

- « Si j’étais président de la République… » disait une chanson. Tu ferais quoi, toi ?

Je remplacerais "la Marseillaise" par "Le bonheur flou". Illico. Ca serait pas mal, "le bonheur flou", en ouverture d’un match de foot France-Brésil.

- Quelles sont vos prochaines dates de concert ?

16 mars 2007 : Au Sentier des Halles à 22h (50, rue d’Aboukir, Paris 2ème)
22 mars 2007 : INJEP à 20h (11, rue Paul Leplat, Marly-le-Roi)
31 mars 2007 : la Maison de la Musique à 20h (8, rue des anciennes mairies, Nanterre)
28 avril 2007 : l’Archipel, à 20h (17, bd de Strasbourg, Paris 10ème).

- Je te laisse le mot de la fin…

26 avril 2007 : sortie de l’album "le bonheur flou" dans les bacs. Précipitez-vous sur l’édition limitée, il n’y en aura pas pour toute le monde.

Et puis merci Séverine, merci aux Sistoeurs.

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