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Lyon l’allumée !

samedi 6 décembre 2003, par Séverine Capeille

Le titre des affiches est sans équivoque. Lyon part en live. C’est écrit en blanc sur noir. Plaqué sur tous les murs et les abribus de la ville. Le Lyonnais est prévenu. La fête du 8 décembre, la bonne vieille tradition avec les odeurs de marrons, n’est plus. Pardon, c’est faux pour les marrons, on peut encore en trouver. A côté des Kebbabs, des sandwiches américains, des churros espagnols... Plein. C’est l’âme de l’événement que le pèlerin cherche en vain.

Les phares de la comm’

Pour sa cent cinquante et unième édition, la Fête des Lumières est un festival de communication. Etalé sur quatre jours (du 5 au 8 décembre), l’événement se déroule sur le thème « Lumières en mouvement : lumière dynamique, lumière interactive » dans « Lyon l’allumée ! ».

Le décor est planté. Notons le point d’exclamation, expression de la surprise générale, signe typographique de la foirade annoncée, du caractère carnavalesque de la fête. « Lyon l’allumée ! ». Lyon l’extravagante, la ville un peu folle. Lyon qui dégringole. Lyon où la comm’ a remplacé la parole.

Depuis quelques années, la Fête des Lumières est ambitieuse. La ville s’enveloppe dans une ivresse de watts et déjoue ainsi brillamment les quolibets sur son éventuelle froideur. De nombreux quartiers et monuments sont mis en valeur sous les feux des projecteurs. La ville natale des Frères Lumière brille dans toute sa splendeur. C’est beau. Il faut le reconnaître. Les pentes de la Croix-Rousse, Saint-Jean, la Place Bellecour... scintillent sous l’imagination des architectes, scénographes et chefs opérateurs. L’événement est désormais résolument artistique, tourné vers l’art contemporain, vers la ville de « demain ».

Vendredi 5 décembre. Place des Terreaux. 18 heures. Le temps n’a pas refroidi les badauds qui attendent gentiment le coup d’envoi de l’édition 2003. La musique électronique commence, les façades des bâtiments encerclant la place s’animent et les images défilent. Les ombres de quelques comédiens se mêlent parfois à la danse murale d’un monde technologique. Habillés de costumes rayés, ils alternent les acrobaties et les mouvements saccadés, accompagnent le défilé des représentations contemporaines : voitures, chantiers de construction...

1.3 Million. C’est le budget en euros pour cette nouvelle édition. A ce prix là, il serait permis de rêver... Mais, comme le souligne Claire Peillod (directrice artistique de la Fête des Lumières) : « Nous avons mis l’accent cette année sur l’interactivité ». Effectivement. Quelques 400 000 euros ont été investis pour le projet « Vertical Elevation ». Ce nouveau concept permet de tracer des figures géométriques dans le ciel. Les internautes du monde entier peuvent participer en envoyant leurs oeuvres via le site lyonelevation.net et les découvrir ensuite (grâce à un email qui les prévient du moment de diffusion) dans le firmament de la nuit. Lyon est devenu un pôle d’excellence pour tous les professionnels de la lumière. Des colloques, des ateliers, des rencontres sont désormais organisés autour du thème et font de la ville un rendez-vous incontournable et international.

Les bougies de la vie

Les trois millions de visiteurs attendus durant ces quatre jours ne vont pas s’ennuyer. Lyon fait la folle dans ses artifices de soirées. Mais la fête du 8 décembre n’a pas attendu les progrès technologiques pour être populaire. Traditionnellement, les habitants de la Cité posent des bougies sur les rebords des fenêtres et illuminent la ville de ces petites flammes de vie. Du rêve, des espoirs, des prières, de la magie... étincellent dans la nuit. Des millions de lumignons colorés se retrouvent exposés au froid, à la pluie ou au vent, fidèles dans leur rendez-vous annuel.

Les Lyonnais enfilent des écharpes et descendent dans la rue pour se retrouver dans la presqu’île. Les vitrines des commerçants sont allumées et annoncent les fêtes de fin d’année. La ballade passe par St Jean et se termine à Hôtel de Ville. Cette tradition des lumières est unique au monde. Tous les quartiers organisent des divertissements. Les spectateurs écarquillent les yeux et leurs « oh ! » étonnés produisent de la buée. La féerie pénètre le coeur des grands et des petits. La fête semble pourtant se recentrer sur le centre-ville cette année. De nouveaux lieux sont décorés (la rue de la République, la Place de la Comédie...) et un rayon laser devrait émaner de la Basilique de Fourvière. Dieu merci ! On avait failli oublier que le 8 décembre est une fête religieuse avant d’être populaire.

Ave Maria

La connaissance est une lumière. Le souvenir de l’Histoire, des origines d’un élan devenu habituel sont nécessaires. Lyon n’est pas une fille de joie. « L’allumée » est née dans un « Ave Maria ». Entre 1564 et 1643, la ville est ravagée par la peste. L’Eglise demande à la Vierge Marie de protéger la cité et de sauver sa population de la maladie. Ils promettent d’effectuer un pèlerinage à Fourvière le 8 décembre de chaque année. La peste disparaît et ne revient pas. On parle de la « Vierge miraculeuse » puis arrive le choléra. Les édiles renouvellent les voeux à la Vierge. Lyon est épargnée une nouvelle fois.

L’inauguration d’un nouveau clocher, surmonté d’une statue en bronze doré, est prévue pour le 8 septembre (fête de la naissance de Marie et date anniversaire du voeu des échevins de 1643) de l’an 1852. Malheureusement, une crue de la Saône envahit les ateliers où l’on coule le métal de la statue. La cérémonie est reportée au 8 décembre, fête de l’Immaculée Conception. Tandis que le Cardinal de Bonald procède à la bénédiction de la statue, un orage s’abat sur la ville contraignant les autorités à annuler de nombreuses festivités et à remettre au dimanche suivant l’illumination de l’église et la procession.

Miraculeusement, dans la soirée, le temps redevient clément. La population illumine alors spontanément les fenêtres et les balcons de petits lumignons. La ville endosse un manteau scintillant dans le froid de l’hiver, s’embrase dans la ferveur de ses croyances. Les technologies peuvent bien progresser, les techniques s’améliorer, rien ne viendra jamais remplacer la splendeur des flammes qui brûlent ensemble, éclairant l’obscurité en harmonie et en fraternité..

1 Message

  • > Lyon l’allumée !

    12 décembre 2005 17:51
    un tres bel article, vraiment je me tue chaque annee a rabacher aux gens que le 8 decembre n´est pas la fete des lumieres, mais un remerciemet a la vierge, j espere que la ville de lyon, va arreter son futurisme et ses technologies, quil yait des lumiere c est bien, mai que lyon evoque le nom de marie, et que ca reste simple, ca serait vraiment bien

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